Les entreprises d’un secteur en grande difficulté peuvent-elles à titre exceptionnel s’entendre pour relever leurs prix et enrayer leurs pertes ? Non, trois fois non. La crise dans une branche ne peut ni justifier ni excuser des comportements anticoncurrentiels. « Dans ce genre de cas, l’entente est au contraire la pire des solutions, affirme Bruno Lasserre, le président de l’Autorité de la concurrence. Il faut que les acteurs économiques le comprennent une fois pour toutes. Elles se croient protégées par leurs ententes, et cela les dissuade de s’attaquer à leurs problèmes structurels. Cela ne fait que repousser les solutions de fond. » Tel est le vigoureux message envoyé par le gendarme français de la concurrence avec sa décision rendue mardi 15 décembre concernant les sociétés de transport de colis. Une décision spectaculaire. Alors que ce métier de la messagerie est sinistré depuis des années, l’Autorité a choisi d’infliger à vingt des principales entreprises et à leur fédération patronale une sanction financière massive. Ensemble, Geodis, DHL, Chronopost, FedEx et les autres vont devoir payer 672 millions d’euros. Cela en fait la deuxième sanction la plus lourde de l’histoire de l’Autorité de la concurrence (…) Des sociétés qui ne roulent pas sur l’or (…) Cette fois-ci, les sociétés dans le collimateur de l’Autorité de la concurrence ne roulent pas sur l’or, loin de là. Depuis des années, le secteur du transport de colis souffre de surcapacités, et les prix suffisent à peine à couvrir les frais de la plupart des opérateurs. En 2009, quand toute l’économie a plongé, la profession a même globalement perdu de l’argent. De nombreuses entreprises ont mis la clé sous la porte. (…) A la clé, des licenciements par milliers. Ces difficultés récurrentes expliquent sans doute que les entreprises aient tenté d’agir ensemble pour remonter leurs tarifs. Ce sont deux sociétés à capitaux allemands qui ont vendu la mèche. Leurs dirigeants ont révélé l’affaire à l’Autorité de la concurrence, et fourni des documents, afin de bénéficier de la procédure dite de clémence. Les deux entreprises se voient ainsi condamnées à des sanctions bien inférieures à celles qu’elles auraient encourues sinon.(…) Lors de la procédure, les groupes de messagerie ont affirmé que, compte tenu des surcapacités dans le secteur, l’éventuelle entente n’avait eu que des effets « très limités » sur les prix pratiqués. Et qu’elle n’avait pas empêché les dépôts de bilan de Sernam et Mory. Mais pour l’Autorité, les faits sont avérés, l’entente a duré au moins six ans, et les dommages causés aux clients sont élevés. « La quasi-totalité du tissu industriel et commercial français a été affectée par ces pratiques », en particulier les entreprises de commerce par Internet qui livrent leurs produits par colis, dit-on rue de l’Echelle. Le gendarme de la concurrence se défend toutefois d’avoir eu la main très lourde. (…) « A chaque fois que nous avions une marge de manœuvre, nous l’avons utilisée à la baisse », assure M. Lasserre. Pas de quoi apaiser le ressentiment des entreprises condamnées. « Les pénalités infligées aujourd’hui vont encore aggraver la crise structurelle qui frappe l’activité », réagit au contraire le syndicat TLF. (…) Sous prétexte de protéger un marché, l’Autorité de la concurrence risque de le « détruire », conclut TLF. Extrait du Journal Le Monde, par Denis Cosnard, le 14 décembre 2015 [texte abrégé]
Comprendre le dilemme du prisonnier
Lecture d’une matrice de gains : d’après vos connaissances de cours, comment se lit une matrice de gain ? Par exemple, en vous référant au document 1, si Andros coopère alors que Charles & Alice fait défection, quels seront les gains de chacun ?
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Si Andros coopère et Charles & Alice fait défection, Andros va faire un gain de 3 et Charles & Alice un gain de 12, car les gains de Andros (joueur en ligne) sont par convention à gauche dans chaque parenthèse, et ceux de Charles & Alice (joueur en colonne) à droite.
EXPLICATIONS : Dans chaque case, par convention le gain à gauche est celui d’Andros (joueur 1 en ligne) et celui de droite celui de Charles & Alice (joueur 2 en colonne)
Si Andros coopère, il choisit la stratégie représentée dans sa ligne 1, il va obtenir 10 si Charles & Alice coopèrent aussi, ou 3 si Charles et Alice font défection :
Si Charles & Alice font défection, ils choisissent la stratégie représentée par leur colonne 2, ils vont obtenir 12 si Andros coopère, et 5 si Andros fait défection :
D’après vos connaissances de cours, donnez la définition d’une stratégie dominante. Dans le cas présenté au document 1, y a-t-il une stratégie dominante qui se dégage ?
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Une stratégie dominante est une stratégie qui rapporte le meilleur gain quelque soit le choix de l’autre joueur. Dans le jeu présenté au document 1, la stratégie dominante des deux joueurs est de faire défection. Mettons nous à la place d’Andros. Si Charles & Alice coopèrent, Andros peut choisir de coopérer et avoir 10, ou faire défection et avoir 12. Si Charles & Alice coopèrent, Andros préfère faire défection. Si Charles & Alice font défection, Andros peut choisir de coopérer et avoir 3, ou faire défection et avoir 5. Si Charles & Alice font défection, Andros préfère faire défection.
Dans tous les cas, quoi que fasse Charles & Alice, Andros préfère faire défection. C’est sa stratégie dominante. Symétriquement, mettons-nous à la place de Charles & Alice. Si Andros coopère, Charles & Alice peuvent choisir de coopérer et avoir 10, ou faire défection et avoir 12. Si Andros coopère, Charles & Alice préfèrent faire défection.
Si Andros fait défection, Charles & Alice peuvent coopérer et avoir 3, ou faire défection et avoir 5. Si Andros fait défection, Charles & Alice préfèrent faire défection.
Dans tous les cas, quoi que fasse Andros, Charles & Alice préfère faire défection. C’est sa stratégie dominante. Bonus : quand on se met à la place du joueur 1, on doit envisager l’une après l’autre les stratégies que peut adopter le joueur 2.
Quel est l’équilibre du jeu présenté dans le document 1 ? Pourquoi est-ce un dilemme du prisonnier ?
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Les deux joueurs vont jouer leur stratégie dominante, l’équilibre sera donc (D,D), et le gain sera de 5 pour chaque joueur. C’est un dilemme du prisonnier car la poursuite de l’intérêt individuel ne débouche pas sur l’intérêt collectif. On pourrait améliorer la situation des 2 joueurs
Comprendre l’application de la théorie des jeux à une situation d’oligopole
D’après vos connaissances de cours, donnez une définition de l’oligopole, et une définition du pouvoir de marché.
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Un oligopole est une structure de marché où quelques entreprises sont en concurrence mais où l’entrée de nouvelles entreprises n’est pas libre.
Qu’est-ce qu’une interaction stratégique ? Pourquoi les oligopoles y sont-ils soumis ?
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Une interaction stratégique est une situation où le gain de chaque acteur dépend de ce qu’il fait mais aussi de ce que font les autres acteurs. Dans le cas d’un oligopole, le profit que va faire une entreprise va dépendre de ses propres choix, mais aussi du comportement des autres entreprises avec laquelle elle est en concurrence sur le marché.
Expliquez comment la théorie des jeux permet de comprendre que les oligopoles tendent soit vers une entente soit vers une exacerbation de la concurrence.
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Le jeu présenté dans le document 1 montre que si chaque entreprise joue sa stratégie dominante, on tend vers une exacerbation de la concurrence, où les profits sont faibles pour chacune des parties. Mais comme les 2 entreprises feraient de meilleurs profits en coopérant, elles peuvent essayer de former une entente.
Dans le document 2, expliquez la phrase en gras et en italique. Comment la rapportez-vous au jeu du dilemme du prisonnier ?
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Même dans le cas d’une entente, certaines entreprises vont être tentées de « vendre la mèche » pour « bénéficier de la procédure dite de clémence ». Dans le vocabulaire de la théorie des jeux, les entreprises sont tentées de faire défection. Si la procédure de clémence leur permet de réaliser un meilleur bénéfice que celui qu’elles réalisent grâce à l’entente, il s’agit d’un dilemme du prisonnier. Si le bénéfice est moins grand qu’avec l’entente, il s’agit surtout d’une crainte que l’entente soit découverte par un autre biais (défection d’une autre entreprise ou enquête spontanée des autorités).
Pourquoi l’autorité de la concurrence souhaite casser les ententes dans les cas généraux ? Le document 2 présente le cas particulier d’une industrie qui réalise collectivement des bénéfices très faibles voire des pertes. Comment l’autorité de la concurrence explique-t-elle que les sanctions soient tout de même adoptées dans de tels cas ?
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Dans les cas généraux, les ententes sont cassées pour éviter que les oligopoles n’abusent de leur pouvoir de marché, c’est-à-dire pour éviter qu’elles fixent un prix supérieur au coût marginal de production. En effet, si le prix est trop élevé, les consommateurs sont désavantagés : leur surplus est moindre. De plus, si le prix est trop élevé, la quantité échangée sur le marché sera plus faible qu’en situation de concurrence. Il y a des échanges qui pourraient permettre un surplus collectif plus important qui ne se font pas pas pour que les entreprises fassent un profit plus important. Cependant, les entreprises de livraison de colis ne semblent pas faire de profit important. Au contraire, leur secteur réalise des pertes. L’autorité de la concurrence estime que ce n’est pas une excuse : la concurrence permet aussi d’éliminer les entreprises qui ne sont pas rentables, et de pousser à trouver la meilleure technologie de production. C’est pourquoi l’autorité de la concurrence a sanctionné ce secteur, pour que les réformes structurelles qui doivent y être faites soient mises en œuvre.