Dracula est un roman épistolaire de l’écrivain britannique Bram Stoker publié en 1897. Il raconte l’histoire du comte Dracula, un vampire immortel qui se repaît du sang des vivants et peut les transformer à leur tour en créature démoniaque.
La complexité du personnage de Dracula renouvelée par des thèmes modernes chers à la psychanalyse comme l’association d’Éros et de Thanatos — du désir sexuel et de la mort — ou le questionnement des limites (entre la bête et l’homme, entre la vie et la mort ou entre le Bien et le Mal…) en feront un mythe moderne que le cinéma contribuera à amplifier par le biais d’adaptations.
Dracula n’est pas le premier roman fantastique à exploiter le thème du vampire. Il marque pourtant une étape cruciale dans la littérature fantastique et en particulier celle abordant le thème des vampires ; le succès du livre et la popularité du personnage l’attestent encore aujourd’hui. Plus que le sens du récit et la maîtrise du suspense de Stoker, c’est la personnalité de son personnage principal qui fonde le mythe. Le comte Dracula, au-delà de la créature d’épouvante aux pouvoirs surnaturels, est avant tout un être humain damné, un non-mort, et c’est cette dimension complexe qui assure son charme.
Le récit se joue entre l’Angleterre et la Transylvanie au XIXe siècle, notamment dans un château retiré des Carpates. Se fondant sur des récits mythologiques, Bram Stoker crée le personnage du comte Dracula, un vampire aristocratique à la fois monstrueux et raffiné. La première partie du livre, qui se déroule dans le château du comte, est magistralement teintée d’une atmosphère étrange et sinistre.
Le récit est épistolaire et est composé de fragments des journaux intimes et lettres des protagonistes, ainsi que d’articles de journaux. Des passages ont été retranscrits alors que ce sont des passages enregistrés au phonographe. C’est donc un récit écrit à la première personne mais qui épouse plusieurs points de vue - excepté celui du comte.
On ne connaît pas avec certitude les documents auxquels Bram Stoker a eu accès, mais le rapprochement des éléments du roman avec les ouvrages disponibles au moment de sa conception indique, selon Denis Buican et Neagu Djuvara ((???) et (???)) que l’auteur a pu puiser aux sources suivantes :
- Tout d’abord le thème du vampire apparaît dès 1819 en Angleterre, en pleine mode du roman gothique : John William Polidori (The Vampire inspiré d’une idée originale de Lord Byron), Sheridan Le Fanu (Carmilla) mais aussi, en Allemagne, Karl Von Wachsmann (L’Étranger des Carpathes en 1844, avec tous les ingrédients : château en Transylvanie, forêts sombres, personnage maudit, voyageurs effrayés…) et, en France, Charles Nodier (Histoires de vampire), Théophile Gautier (La Morte amoureuse), Paul Féval (qui fait de la goule la femelle du vampire dans La Vampire de 1856) et surtout, cinq ans avant Dracula, Jules Verne (Le Château des Carpathes), sans oublier le roman de Marie Nizet : Le Capitaine Vampire.
- Bram Stoker a rédigé son roman en pleine horreur médiatique suscitée par son contemporain Jack l’Éventreur, qui sévit à Londres en 1888.
- Sur les cartes disponibles à l’époque, Stoker a cherché les noms des lieux où Vlad Țepeș et ses contemporains ont fait campagne, et comme la Transylvanie était alors autrichienne, dans le roman les noms de lieux sont donnés dans leur forme allemande : cela a peut-être contribué au succès que le personnage de Dracula et son avatar Nosferatu connurent en milieu germanophone.
- Enfin, la zoologie de l’époque avait déjà porté à la connaissance d’un public friand d’animaux exotiques, l’existence en Amérique du Sud d’une famille de chauves-souris hématophages, aussitôt baptisées « vampires »1 (???).
Après le succès du roman de Stoker, le personnage de Dracula devint l’un des plus vigoureux mythes modernes, donnant naissance à une riche littérature fantastique autour du thème des vampires. Dans un article intitulé Les Avatars de Dracula dans la littérature contemporaine, Jean Marigny retrace l’histoire de cette littérature qui s’est développée depuis la seconde moitié du XXe siècle et qui a su épouser des genres littéraires fort diversifiés et parfois inattendus : fantastique, bien entendu, mais également érotique, historique, policier, science-fiction, parodie, et même jeunesse. La qualité de ces écrits est extrêmement variable. Certaines œuvres prêtent néanmoins au célèbre vampire une complexité intéressante, et révèlent le conflit qu’il incarne entre Éros et Thanatos, construisant un personnage tourmenté, damné.
Il existe environ 200 films dans lesquels Dracula tient le rôle principal, ce qui en fait une des figures cinématographiques les plus populaires. Les adaptations du roman sont :
La première adaptation du livre de Bram Stoker (et le premier film traitant du thème du vampire) s’intitule Drakula halála de Károly Lajthay en 1921 (1923 est parfois avancé, mais il semble que ce soit une ressortie) par Karoly Lajthay, avec Margit Lux et Paul Askonas. Deux années avant le film de Murnau, ce film hongrois, réalisé sans l’autorisation de la veuve de Bram Stoker, a été tout d’abord considéré comme étant la première adaptation cinématographique du roman. Des découvertes plus récentes semblent indiquer que ce n’est pas le cas. Ce film est aujourd’hui considéré comme perdu.
Nosferatu le vampire ((de) Nosferatu, eine Symphonie des Grauens) réalisé par Friedrich Murnau en 1922 est la deuxième adaptation - officieuse - du roman de Stoker. Murnau chercha à éviter de payer les droits d’auteur et à cette fin changea le nom de tous les personnages ainsi que la localisation de l’intrigue. Ceci n’empêcha pas l’héritière, Florence Stoker, de l’attaquer en justice et d’obtenir la destruction des négatifs originaux ainsi que la plupart des copies, ce qui ne fut pas fait. Ce premier Nosferatu a fait l’objet d’un remake spécifique : Nosferatu, fantôme de la nuit de Werner Herzog en 1979 avec Klaus Kinski, Isabelle Adjani et Bruno Ganz.
Dracula est un film de 1931 réalisé par Tod Browning, avec Bela Lugosi qui joue pour la première fois Dracula. Le scénario du film de Browning n’est pas une adaptation directe du roman de Stoker, mais de la pièce d’Hamilton, dans laquelle Lugosi (Dracula) et Edward Van Sloan (Van Helsing) jouaient déjà. Gregory A. Waller14 souligne cependant que dans l’adaptation cinématographique ont été ajoutées des scènes de Stoker qui avaient été omises par Deane pour des raisons pratiques essentiellement ; le voyage en mer, par exemple. L’auteur souligne également une duotomie, introduite dans le film, entre Reinfield et Dracula, le premier ne parvenant pas à s’intégrer à la société transylvanienne tandis que le second fait montre d’une sociabilité absente. Une version en langue espagnole fut réalisée par George Melford et Enrique Tovar Avalos avec Carlos Villarias et Lupita Tovar.
En 1958, Terence Fisher réalise Le Cauchemar de Dracula avec Christopher Lee l’un des acteurs les plus représentatifs du rôle de Dracula. Le film présente une version plus gothique de l’œuvre. Hammer Films produisit ensuite une dizaine de films autour du personnage de Dracula, tous interprétés par Christopher Lee. Dracula et ses femmes vampires Dracula et ses femmes vampires (Dracula) réalisé en 1973 par Dan Curtis avec Jack Palance et Simon Ward. C’est cette adaptation qui mettra pour la première fois en avant l’idée du vampire confronté à la réincarnation de son amour perdu, qui sera exploité plus tard dans l’adaptation de Francis Ford Coppola.
Dracula réalisé en 1979 par John Badham avec Frank Langella et Laurence Olivier. Cette version prend comme point de départ le voyage de Dracula vers les côtes anglaises à bord du Demeter, épisode qui se situe initialement au centre de l’intrigue. Alors qu’elle se promène sur la plage, Mina, qui est ici la fille de Van Helsing, découvre le corps inconscient du comte, unique survivant du naufrage du bateau. Dracula sera ensuite introduit auprès des personnes de son entourage : le Dr Seward, ami de son père, Lucy Seward et son fiancé, Jonathan Harker. Mina, puis Lucy, succomberont rapidement aux charmes du comte. Le Dracula qui est ici mis en scène est très sensuel et distingué ; il fait par ailleurs preuve d’une certaine humanité puisqu’il lui est possible de tomber amoureux. L’action est déplacée dans les années 1910, ce qui accentue encore le décalage entre une Angleterre résolument moderne et les valeurs passéistes que porte le comte.
En 1992, sort le film de Francis Ford Coppola, sur un scénario de James V. Hart : Dracula ((en) Bram Stoker’s Dracula) avec dans le rôle-titre Gary Oldman, accompagné de Winona Ryder, Keanu Reeves et Anthony Hopkins. Ce film, qui est sans doute celui qui suit le plus près l’œuvre de Stoker, prend, toutefois, de nombreuses libertés.
Dracula Untold, réalisé en 2014 par Gary Shore avec dans le rôle principal Luke Evans retrace l’histoire du prince Vlad III et de son épouse Mirena, juste avant qu’il ne devienne Vampire. Le scénario de Matt Sazama et Burk Sharpless souligne la dualité entre le bien et le mal, un héros qui devient démon pour sauver les siens.
On a peu vu le roman porté à la scène. On peut toutefois noter Dracula, adaptation de Denis Leddet et Christian Lutz, scénographie de Patrick de Longrée, qui a été représentée en 2007 dans le cadre des ruines de l’abbaye de Villers-la-Ville, à l’occasion de l’été théâtral de Villers-la-Ville. Il y’a aussi eu une adaptation sous forme de comédie musicale en France en 2011 intitulée Dracula, l’amour plus fort que la mort, réalisé par Kamel Ouali. On compte aussi une adaptation en comédie musicale au Québec, Entre l’amour et la mort, avec dans le rôle-titre le chanteur canadien Bruno Pelletier, en 2006.
Juste retour des choses, l’enzyme salivaire de ces chauves-souris « vampires », qui leur permet de retarder la coagulation, a été baptisée « Draculine » par les scientifiques.↩