Les enjeux du modèle d'allocation des flux

Philéas Condemine
2018-03-15

Contexte général

  • L'objectif de cet outil “simplex” est de simuler l'impact de l'ajout/suppression de sejours/places pour une spécialité médicale donnée.
  • Ajout/suppression peut signifier création/fermeture d'un établissement ou modification du nombre de sejours.
  • La simulation se base sur un modèle d'allocation des flux.
  • Par nature, un modèle propose un reflet imparfait de la réalité.
  • Afin d'illustrer l'écart entre simulation par le modèle et réalité, celui est d'abord appliqué aux données de flux réels.
  • Ainsi, avant même d'ajouter/supprimer des sejours/places, on observe la façon dont le modèle d'allocation modifie les flux réels tout en respectant certaines contraintes.
  • Lorsqu'on teste l'ajout/suppression de sejours/places pour des spécialités données, le modèle d'allocation des flux est relancé et modifie à nouveau les flux et donc les temps de transport.
  • Finalement on va mesurer l'impact de l'ajout/suppression de sejours/places comme l'écart entre les flux optimisés avant/après ajout/suppression de sejours/places.

Modèle actuel - Méthodologie

Le modèle d'allocation des flux propose d'allouer les flux de sorte à minimiser le temps de transport moyen sous contrainte de capacité d'accueil de l'établissement. D'où le nom de l'outil simplex.
Pour cela le modèle utilise les temps de transport de commune de résidence (comr) à commune de l'établissement de santé (comh) fournis par le distancier INSEE.
La capacité d'accueil un établissement est définie par les flux totaux qu'elle accepte dans l'année.

  • Pas de prise en compte des pics d'offre/demande qui justifient/imposent parfois des déplacements plus longs.
  • Pas d'effet notoriété/spécialisation/taille de l'établissement.
  • Pas d'intégration des caractéristiques socio-économiques ou démographiques des communes de résidence.
  • Le temps de calcul est long car les modèles d'optimisation sont bien plus lents que les modèles prédictifs mais permettent de respecter strictement les contraintes imposées.

Modèle actuel - Illustration des limites du modèle :

Si en pratique le temps de transport compte pour 50% dans les préférences du patient pour un établissement, et que 50% sont définis par la taille de l'établissement, son niveau de spécialisation et d'autres indicateurs plus difficiles à récupérer tels que la notoriété des praticiens, le délai de retour à la normal, le taux de “réussite” de l'opération…
Alors lorsque le modèle annonce un gain de 10% sur le temps moyen d'accès aux soins, en réalité le gain est de 50% x 10% => 5%.
Le modèle actuel ne permet pas

  • de mesurer le poids de chaque paramètre dans les choix du patient
  • de relativiser ce gain (5% et non 10%)
  • d'ajuster le modèle de l'inexactitude du distancier ie les patients ne sont pas situés au centre de la commune, idem pour l'établissement.

Ecart allocation optimale vs flux réels

Les graphes proposés dans les slides suivantes représentent la distribution des temps de trajets dans le flux réels vs les flux optimisés.

Ce temps de trajet est estimé sur la base du distancier (temps de trajet en minute) entre communes.

Le temps de trajet est découpé en tranche d'environ 16 minutes, plus précisément : 0-16, 16-32, 32-48,48-64,64-80,80-100, >100 minutes.

Les flux optimisés minimisent le temps de trajet moyen sans tenir compte des (autres) préférences des patients.

Limites du modèle d'allocation actuel - Languedoc

Limites du modèle d'allocation actuel - IDF pneumo

Limites du modèle d'allocation actuel - IDF pediat

Limites du modèle d'allocation actuel - IDF ChirVisc

Limites du modèle d'allocation actuel - ChirInfant

Limites du modèle d'allocation actuel - Corse

Etonnements

Constats dans le modèle d'allocation par minimisation du temps de trajet

  • En pratique les patients ne cherchent pas seulement à minimiser le temps de trajet.
  • En outre, le distancier est imprécis puisqu'il mesure des temps de trajet du centre d'une commune à une autre plutôt que de tenir compte de vraie position de l'établissement et/ou de la position probable des patients.
  • Le temps de trajet est le seul critère d'optimisation alors qu'il est imprécis (commune à commune).

Pour illustrer, voici des exemples de positions d'établissements de santé versus les contours des communes. Lorsqu'un établissement est proche de la frontière, il est naturel que certains résidents préfèrent se rendre dans l'établissement de la commune voisine plutôt que dans un établissement de leur commune, plus éloigné.

Proposition d'amélioration

  • On souhaite proposer un modèle d'allocation le plus réaliste possible afin de mieux évaluer l'impact de l'ajout/suppression ou modification des capacités d'accueil d'un ou plusieurs établissements.
  • Le modèle de préférence sera calibré/entraîné sur les flux réellement observés de commune de résidence à établissement.
  • Pour cela on va construire un modèle de préférence basé sur différentes informations contextuelles :
    • Position réelle de l'établissement pour prendre en compte la distance de la commune de résidence à l'établissement. Ce facteur est important lorsqu'il y a plusieurs établissements par commune. Dans les flux historiques, sur 1558 établissements, 684 sont seuls dans la commune, 874 ont au moins un établissement “concurrent” dans la même commune !
    • La taille de l'établissement : effet d'attraction général
    • le niveau d'identification de l'établissement à une spécialité donnée : effet d'attraction spécifique
    • Informations sur l'établissement disponibles sur finess.sante.gouv.fr.
    • Le nombre d'établissements présents à proximités : effet de compétition
    • La comparaison des distances : le mécanisme de préférence est différent si les temps de trajets vers A ou B sont
      • 5 minutes vers A vs 15 minutes B (x3) => A >> B
      • 50 minutes vers A ou 60 minutes vers B (+20%) => A ~ B
    • Socio-économiques : richesse de la commune
    • Démographique : nombre de plus de 70 ans dans la commune

Construction du modèle

  • Souvent la demande ne rencontre pas l'offre (sur ce sujet la distance n'est pas le seul facteur). On propose donc un premier modèle qui vise à déterminer si au moins un patient ira dans cet hôpital.
  • Sous hypothèse qu'au moins un patient se rende dans cet hôpital, on réalise un second modèle qui estimera la proportion des patients de la commune qui se rendront dans cet hôpital
  • Afin de rendre ce modèle exploitable on ajustera les prédictions de sorte à satisfaire les contraintes de capacité des établissements et flux émanants des communes.

Ce modèle part du principe que les patients choisissent leur hôpital. On pourra proposer d'autres cadres de modélisation. Par exemple on pourrait supposer que l'hôpital choisit son patient.

Etat d'avancement au 7 mars

On présente ci-après les performances des modèles réalisés le 7 mars.
A ce stade on proposait une modèle de flux de commune (de résidence) à commune (de l'établissement). Les variables explicatives étaient les suivantes :

  • Temps d'accès de commune à commune
  • Ecart et ratio du temps d'accès à l'établissement le plus proche vs cet établissement.
  • Surface de la commune résidence/établissement (quantifie l'erreur du distancier)
  • Volume traité par l'établissement (par spécialité).
  • Nombre de spécialités proposées par l'établissement (sur la base des flux empiriques).
  • Nombre d'établissements “interessants”.
  • Nombre de communes intéressées par l'établissement.
  • Fraction de la demande que représente cette commune vs autres communes intéressées.

ROC - Modèle 1 : flux non nul de commune vers établissement

AUC 90%

Formulation - Modèle 2

On modélise la fraction \( \Large F_{R,H} \) de la demande émise par la commune de résidence R, allouée aux établissement d'une commune H.

\[ \Large F_{R,H}=\frac{C_{R,H}}{C_R} \]
\[ \Large \text{where } C_R=\sum_H{C_{R,H}} \]

Performance actuelle du modèle : RMSE=0,096

RMSE: Root Mean Square Error

\[ \Large RMSE=\sqrt{\sum_{(R,H)}{(\widehat{F_{R,H}} - F_{R,H})^2}} \]

Ecarts visuels - Modèle 2

Courbe de Lorenz - Modèle 2

Prochaine étapes

  • Modèle plus granulaire de flux de commune de résidence à établissement. Ceci suppose un distancier de commune à établissement.
  • Utilisation de données plus pertinentes par exemple socio-économiques, démographiques et informations supplémentaires sur les établissements à partir de finess.sante.gouv.fr.
  • Construction d'une méthode pour contraindre les prédictions afin de satisfaire les contraintes de capacité des établissements et demande des communes.
  • Ajout de graphes similaires à ceux de l'appli Simplex initiale pour comparer le “réalisme” des modèles. Mettre à jour les flux pour travailler sur des données récentes.
  • Distinguer le modèle dans le cas de l'ajout d'un nouvel établissement vs simple modification de la capacité d'accueil par spécialité.
    Dans le cas de l'ajout d'un établissement beaucoup d'hypothèses doivent être critiquées, en particulier les effets notoriété et degré de spécialisation de l'établissement.
  • L'extraction des séries des flux annuels permettrait de tenir d'effets temporels :
    • Impact du vieillissement de la population.
    • Inertie des effets de réputation. Par exemple, si on crée un service en année n, les flux vont-ils être impactés immédiatement ? Sinon au bout de combien de temps, et de quel manière, les flux se rapprochent-ils du modèle de préférence ?
  • Doit-on tenir compte de la concurrence des établissements privés ?
    • Si on n'en tient pas compte, on ne reflète pas proprement la réalité de l'offre et les préférences en fonction du modèle tarifaire
    • On peut réaliser un modèle en incluant les établissement privés mais il n'y aura pas d'intérêt à simuler une modification des capacités (non réalisable)
    • On pourrait éventuellement essayer de mesurer l'impact d'une modification des subventions, mais on n'a pas d'information suffisamment granulaire pour pouvoir rapprocher les subventions aux services/spécialités.